Musee de la porcelaine

Alison Elizabeth Taylor

Dans une palette de couleurs plutôt restreintes, Alison Elizabeth Taylor réalise le portrait – imaginaire – d’une Amérique désertique ainsi que celui de ses habitants. De nombreux visages peuplent ces tableaux de bois : portraits ou scènes de genre, ils racontent une population de travailleurs et de marginaux. D’emblée, il est intéressant de relever qu’Alison Elizabeth Taylor travaille la marqueterie, soit une forme d’art très éloignée, aussi bien historiquement que culturellement, des sujets qu’elle représente.

En effet, c’est en Italie, entre le XVe et le XVIe siècle, que la marqueterie a contribué à l’embellissement de nombreux palais et églises. Même s’il est difficile de dater avec exactitude l’avènement de cette technique, celui-ci semble coïncider avec le recours, pour la première fois dans l’histoire des arts, au bois nu (auparavant, le bois était toujours peint, stuqué ou doré). Par la suite, les artistes ont pratiqué ce que l’on pourrait appeler la « marqueterie picturale » (tarsia pittorica), soit une forme de marqueterie qui a tenté de rivaliser avec la peinture et, notamment, par ses effets de couleurs. Contrairement aux artistes de la Renaissance, Alison Elizabeth Taylor ne cherche pas à opposer le travail du bois à celui de la peinture. Elle les réunit, précisément, sur une même surface dans chacune des œuvres présentées dans cette exposition. C’est pourquoi son travail intéresse le Château de Nyon qui se consacre à réunir art contemporain et arts décoratifs.

Très américain dans sa manière de représenter le monde, le travail d’Alison Elizabeth Taylor est porteur de multiples références : on pense à Caspar David Friedrich devant No Side To Fall In et Red Morning, portraits d’arbres au soleil levant, mais aussi aux peintres américains William Hartnett et John Frederick Peto, lorsqu’on examine le mur aux souvenirs situé juste derrière le garçon de The Good War. Edward Hopper peut également être évoqué devant l’apparente solitude du joueur de Play Station. L’ambiance générale qui se dégage de ces œuvres renvoie encore à tout un pan du cinéma d’auteur américain : Larry Clark, Gus Van Sant, mais aussi Michael Cimino et, plus particulièrement, les scènes de chasse de Voyage au bout de l’enfer (Roadside).

Alison Elizabeth Taylor a vécu une grande partie de sa jeunesse à Las Vegas ; elle a donc grandi à proximité des paysages arides et inhospitaliers qui servent, très souvent, de décors à ses compositions. Ainsi, même si elle vit aujourd’hui à New York, cette savage root (racine sauvage) dont elle est issue – et qui donne son nom à l’exposition – est, visiblement, au fondement de son œuvre.



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